Mémoire de la population
Belles réussites et belles rencontres
Mohamed Bouzidi
« Des fleurs dans le béton »
Lakdar est berger lorsqu’il s’engage au cours de la seconde guerre mondiale. Il débarque en Provence, à Nice, le 15 avril 1944. Puis ce sera la guerre d’Indochine.
Il termine son service et en 1956 /57 s’engage dans les Aurès en tant que résistant pour l’Algérie. Membre du F.L.N. Il est recherché par l’armée Française. Il retournera clandestinement en France, à Verdun, où il récolte des fonds auprès des commerçants algériens pour aider l’armée de résistance. C’est à cette époque qu’il connaîtra sa femme Aicha.
Après la guerre Aicha rejoint Lakdar en Algérie en 1969 en touriste, mais c’est à Verdun que les trois derniers enfants seront conçus.Malgré le milieu modeste, l’enfance sera heureuse.
Jusqu’à l’age de cinq ans, Momo réside à Verdun. Le père ouvrier fromager rejoint le sud car l’usine ferme. Il fera venir sa famille quelques mois plus tard.
En 1968 ce sont les événements qui bousculent la France .
On avait pas grand chose mais on était heureux
Le papa est ouvrier dans le bâtiment, Aicha mère au foyer. Il y avait des espaces verts sauvages, non urbanisés, on allait chercher le lait à la ferme, les habitants étaient solidaires. Ils économisaient pour louer un bus pour partir l’été à la mer, de la Couronne, sous l’initiative d’un voisin, qui récoltait les participations. Les enfants des familles picoraient d’une table à l’autre. C’était la bonne époque. Au quartier, les échanges se poursuivaient, les liens de proximité se sont construits à vie.
La population était mixte (Antilles, Afrique du Nord, Afrique noire,- Israéliens, Méditerranéens, Gitans…). Il y avait du lien qui se créait, entre ces différentes populations, des passerelles sociales à travers les échanges culturels et culinaires.
C’était le début des « grands ensembles »
Il se rappelle une anecdote : en période du Ramadan, sa maman avait dessiné un croissant au henné dans le creux de sa main. L’instituteur M. Bernudez l’avait envoyé se débarrasser de cette tache. Il avait passé toute la matinée à essayer de retirer cette «marque interdite ». la réaction de sa mère, très remontée, ne s’est pas fait attendre. Elle est allée demander des explications au maitre. L’après-midi, Momo, dédouané par sa mère n’est pas allé à l’école, en réaction à cette humiliation.
Les soirs de Noël, il y avait le loto de la cité, au centre commercial de Frais Vallon, dans une salle Municipale. C’était l’occasion de se retrouver. Il y avait des paniers garnis, des vélos. L’ambiance était conviviale. « Mon père m’emmenait, il disait que je lui portais chance et nous gagnions souvent ». Les parents nous inculquaient les valeurs, la politesse, le respect, l’hygiène.
Un goût de liberté
Une enfance paisible, l’après midi on faisait la sieste. Il fallait se méfier surtout de « celui qui donne des bonbons et qu’on ne connaît pas ». Celui dont toutes les mères mettent en garde leurs enfants.
« Lorsque je passe à Frais Vallon, j’observe encore avec mon regard de petit garçon, le seul endroit que je reconnais : l’école communale. Il y a toujours le bâtiment I où j’habitais.
Je me souviens des séances de cinéma à l’école communale, où l’on projetait des documentaires et une fois par mois le mercredi après midi, un film. A cette époque le jour chômé était le jeudi et non le mercredi comme aujourd’hui. L’été, dans la famille, il n’y avait que moi qui partais – ma sœur pleurait pour rester à la maison, moi je pleurais pour aller en colonie. Je ne voulais pas passer l’été aux flamants. C’était une manière pour moi d’échapper au béton, j’avais neuf ans ».
« En 1974, nous sommes arrivés aux Flamants, là j’ai bien connu le béton. Quand je suis arrivé à Frais Vallon, mon père participait à la construction de ces grands ensembles les Flamants et c’est comme cela qu’il s’est fait aider pour y habiter. Aux Flamants c’était le béton, le béton et le béton. Le 26 décembre 1976, de ma fenêtre, j’ai vu un jeune qui courait, poursuivi par deux policiers ».
« J’étais frappé par tous ces murs gris. On s’en plaignait avec mes sœurs, car il y n’avait rien d’autres que le béton, pour s’échapper de tout cela.vIl y avait bien le pic de l’étoile où l’on pouvait trouver les espaces verts. Ces espaces sauvages m’ont marqué.
En 6éme, j’ai commencé à lire Pagnol, je me suis intéressé à Allauch, La Treille, sur les traces de l’écrivain. Je partais à la chasse avec un copain. Je ramassais des figues, des prunes, du thym, du romarin. Je pense que s’il y avait eu plus de lieux comme ces zones verdoyantes de Verdun, il y aurait moins de dégâts, moins de gens pour prendre un mauvais départ dans la vie ».
« Ces espaces de jeux sont importants, lorsque l’on on est enfant. Avec le béton, on ne s’approprie pas les emplacements sinon par défaut. Le seul endroit que j’investissais, c’était la Treille et la colline marseillaise, avec mes potes : Marcel Dassylva, Bagdad, Gilbert Copolla son grand frère. On dormait là-bas, on faisait des grillades et l’on passait la nuit du vendredi soir sur place. Le samedi, on ramassait des aromates et nous revenions en fin d’après-midi. C’est ce qui je crois m’a permis de quitter plus tôt le quartier, habité par cette envie d’aller ailleurs ».
Mes années Collège entre la Belle de Mai et les Flamants
C’était la période du bloc 9 aux Flamants. C’est là que j’entendais les premiers rodéos de voitures volées. Je me souviens que le facteur qui livrait les mandats s’était fait agressé par les jeunes.
« En 1976, je découvre la musique, car mon grand frère jouait de la basse dans le groupe « Santa Fé » à Frais Vallon et j’assistais aux répétitions. Mon goût pour la musique date de cette époque ».
À seize ans, il s’évade régulièrement du quartier de colonies en camp d’adolescents. C’est dans ces années-là que je l’ai rencontré, durant l’un des séjours à Caussol.
Vers dix-sept dix-huit ans, la musique l’accompagne, il l’aborde dans les cages d’escaliers.
Le chant arrivera plus tard après le 18 Octobre 1981, comme un besoin de dire, de crier haut et fort. “Yaoulidi” (mon fils sera sa première chanson, après l’assassinat de Lahouari Ben Mohamed). Cette chanson lui fait prendre conscience de la puissance des mots. Il découvre aussi le racisme, ouvre les yeux sur la misère des cités puis du monde.
Momo a 19 ans lorsqu’il passe son BAC, puis il présente un D.E.U.G. d’histoire pour être archéologue. Mais son univers est musical. Animateur sur le tas, il se déguise en Pierrot et grimpe sur les toits pour voir les yeux émerveillés des enfants à qui il donne des leçons d’éveil musical.
« Quand j’ouvrais ma fenêtre au 9ème étage, je regardais les collines du Pic de l’Etoile et je me demandais qu’est-ce qu’il y a derrière, c’était ça mon horizon ».
Il fuguera trois mois en Savoie car il subit trop de pression. Il rêve de liberté. Ses parents lance une recherche dans les médias.Il réapparaît au quartier.J’ai toujours était perçu comme l’étudiant puis après l’artiste.
En 1984 il rencontre Jo Ross, et commence ses premières tournées à l’Université du Citoyen.
Alors qu’il tournait en tant que chanteur, Jo organise une grande fête dans une grande maison au pied de Notre Dame de la Garde. Liliane fait la surprise à Momo, elle est là et depuis il n’est jamais retourné chez lui, dans sa maison des Flamants. Il a vécu avec elle et partagé un temps une colocation avec un autre artiste, Akim Amadouche.
1985, naissance du premier enfant, Ménélik. Mohamed Bouzidi retourne, au bout d’un an et demi dire, au revoir à ses parents. En 1986, il obtient le premier prix d’un concours de chant au Printemps de Bourges.
Le lendemain de son anniversaire, le 27 juin 1986, dégoûté du milieu socio culturel il rejoint Lyon avec toute la famille.
Momo fait le constat qu’il y a des gens, travailleurs socio ou culturels, extérieurs aux quartiers qui ont profité des suites provoquées par la mort de Lahouari et de Zaher, afin d’exploiter pour leur propre intérêt les financements que Mitterrand avait octroyés pour la banlieue.
Deux années difficiles où il joue de la guitare dans la rue pour vivre. Il effectue des va-et-viens à Marseille pour jouer avec le Théâtre de la Mer.
Wake up and Live
1993, nouvel emploi au Théâtre du Guignol où il travaillera pendant quatre ans
1997 séparation avec Liliane. Momo repart sur Paris, jusqu’en 1999. Il participera à des tournages:
Lyon Série : Police spéciale.
Quand tu descendras du Ciel : un long-métrage
Mixité : un film sur banlieue
De Momo le Marseillais à Mehdi Bouzidi sur Paris
Sur le plan professionnel, au niveau musical, il est en pause. Il se contente de l’Acting.
La musique revient en force en 2002 lors de sa rencontre avec Kader Samaké. Il intègre “Slyde” une formation de Pop Rock Reggae. Kader demande de lui écrire un album, musique et texte : ”Slyde Système”. L’aventure se poursuit jusqu’en 2007.
Le 18 0ctobre 2011
Momo a participé au nouveau spectacle Yaoulidi avec :
Moussa Maaskri
Kamel Boudjellal
Brahim Maaskri
Zohra Aït Abass
Mourad Asseum
En hommage à Lahouari Ben Mohamed, sous l’initiative de Hassem Ben Mohamed.
Il arrête l’acting et revient à ses premiers amours, le plaisir des mots. Il a appris à faire des arrangements, à travailler pendant des heures avec rigueur. Il découvre le solfège et les tournées professionnelles.
Fin 2007 il intègre un gros label Français – Inter Price – et accompagne Diams, Synik. Il est présent aux Francofolies avec Emma de la Star Académie 3, et l’aventure se poursuit.
Le 30 Octobre 2011, il prépare l’ émission TARATATA avec Emma qui sera diffusée courant Novembre 2011