La Marseillaise – Avril 2019

La Marseillaise – Philippe Amsellem
15 Avr 2019
http://www.lamarseillaise.fr/culture/patrimoine/75912-marseille-a-la-busserine-des-rues-au-nom-de-3-figures-du-quartier

Marseille : à la Busserine, des rues au nom de 3 figures du quartier

Trois nouvelles rues sont inaugurées ce vendredi 12 avril au matin dans cette cité du 14e. Elles portent le nom de militants qui ont marqué la vie du quartier Saint-Barthélemy : Françoise Ega, Odette Taragonnet et Jacques Marty.

Vendredi matin à 11h, trois nouvelles rues sont inaugurées à la Busserine. Une démarche initiée par le Comité Mam’Ega, en partenariat avec le collectif des associations du Grand Saint-Barthélemy. D’une part, pour des « raisons pratiques », précise Jean-Marc Ega, président du Comité Mam’Ega. « La genèse du projet remonte à 1994. À l’époque, on se donnait rendez-vous en fonction du bâtiment, des noms des familles qui y habitaient ou du magasin qui s’y trouvait ». Afin de palier le problème d’un quartier « impersonnel, la première initiative remonte à 2004, quand on a nommé une rue de la Busserine, Mahmoubi Tir, épicier du quartier : membre de la communauté chaoui. Il y a eu une prise de conscience des fortes personnalités du quartier », rappelle celui qui est l’un des enfants de Françoise Ega, poète et militante martiniquaise, parmi les 3 personnalités donnant son nom à une rue ce matin. Arrivée en 1969 à Saint-Barthélemy, elle était une « militante catholique » – détaille son autre fils, Jean-Pierre – qui a officié comme femme de ménage, puis animatrice socio-culturelle en « en assurant le suivi scolaire des enfants en difficulté » ou en « assistant les familles immigrées dans la rédaction de leurs papiers administratifs. Elle a mis tout son savoir à l’œuvre pour les habitants. Notre maison était toujours ouverte. À sa mort [en 1976], le quartier était noir de monde. On s’est rendu compte qu’elle appartenait à tout le monde, et pas seulement à nous ».
Françoise Ega ne sera pas la seule militante du quartier à donner son nom à une rue de la Busserine. « On a pensé au prêtre-ouvrier Jacques Marty [1929-2015]. Normalement, 5 années doivent s’écouler après la mort de quelqu’un pour qu’il puisse donner son nom à une rue. Mais cette démarche a été appuyée par Monseigneur Pontier », relate Jean-Marc Ega.

Patrick Chamoiseau à la Bibliothèque du Merlan

Celui qui a posé ses valises en 1967 à la Busserine pour travailler dans les huileries, est vite devenu une figure du quartier, participant notamment, en 1975, à la grève des loyers et charges des locataires, pour lesquels il a obtenu gain de cause. « Jacques Marty a aussi beaucoup aidé les Algériens qui étaient regroupés dans un bidonville dans le quartier, près de la voie ferrée. À son arrivée, la population de la Busserine était constituée d’immigrés européens. Puis ils ont laissé la place à la communauté maghrébine après le choc pétrolier de 1973. Jacques Marty n’a jamais regardé les confessions. Il a continué à travailler avec les habitants du quartier », souligne le président du Comité Mam’Ega.
En ce qui concerne Odette Taragonnet, également honorée ce matin, tous parlent d’une « femme engagée, d’origine arménienne à la gouaille bien marseillaise. Elle a eu un rôle important, notamment au sein de l’association de défense des locataires de Saint-Barthélemy III », éclaire Jean-Marc Ega au sujet de cette militante arrivée dans le quartier en 1968, qui faisait « partie de la première vague de militantes ». Selon lui, ces trois figures « représentent la diversité du quartier. Alors que les médias ne montrent les quartiers Nord qu’à travers les faits divers, on espère que les gamins se diront :‘Pourquoi pas nous ?’ » Auteur de Frères migrants, Patrick Chamoiseau sera, à 18h30 à la Bibliothèque du Merlan. Pour écouter l’histoire des vagues successives immigrées qui ont irrigué le quartier du Grand Saint-Barthélemy jusqu’à aujourd’hui.